« Un sujet, un verbe, un complément. Et pour les adjectifs, vous viendrez me voir. » On raconte que Clemenceau, du temps où il était directeur politique de l’Aurore, donnait ce conseil aux journalistes débutants. On lui doit d’ailleurs le titre de l’article de presse le plus connu de l’histoire de France : « J’accuse ! ».
Pour certains, cet objectif de simplicité rassure. Ils pensaient qu’un écrit pro devait donner dans l’administratif, l’alambiqué, le fleuri – une langue étrangère en somme. Et voilà qu’il suffit de phrases courtes et de mots simples : alléluia ! J’ai rencontré en formation un chef d’équipe de collecte des ordures paralysé de devoir rédiger des « rapports de collecte ». De fait, sa production écrite était plutôt confuse. « Si vous devez prendre une baguette et que la boulangerie est fermée, vous savez écrire un SMS pour prévenir à votre femme ?» lui ai-je demandé. « Bien sûr ! » a-t-il répondu, surpris. « Le rapport qu’on attend de vous, c’est la même chose que ce SMS : un camion de déménagement bloquait la rue X. Nous n’avons pas pu collecter ce matin. » Je revois encore le soulagement sur son visage.
Pour d’autres au contraire, cette exigence de simplicité stylistique est frustrante. Surtout s’ils sortent de longues études et ont appris à manier l’art de la dissertation. Certains futurs inspecteurs de l’Urssaf sont déçus de devoir s’adresser aux cotisants avec un style aussi basique. Je les comprends, bien sûr. Mais la priorité numéro 1 d’un écrit professionnel est d’être compris… et lu. Cela ne va jamais de soi, a fortiori quand le sujet est aride et le destinataire non spécialiste. Le style doit donc, avant tout, viser la simplicité.
Phrases courtes, mots courts
La première règle, à cet effet, est de rédiger des phrases courtes. La charte du patient hospitalisé, rédigée par le ministère de la Santé, est exemplaire sur ce point. « La personne hospitalisée est traitée avec égards », proclame l’article 8. Spontanément, on écrit plutôt des choses du genre « L’ensemble du personnel s’engage à mettre tout en œuvre pour traiter toutes les personnes hospitalisées avec le maximum d’égards. » Plus long, plus complexe, moins percutant. Les phrases trop longues sont le défaut stylistique le plus répandu, de loin. Et aussi le plus facile à régler quand on en a pris conscience. Deux options : enlevez les mots inutiles (il y en a toujours), ou coupez votre phrase en deux.
Des linguistes ont démontré que la longueur des mots jouait aussi pour faciliter la lecture. Comparez les deux phrases suivantes. « La diminution de la longueur des mots est un paramètre déterminant de compréhension pour le destinataire. » « Un texte avec des mots courts est plus simple à comprendre. La différence est frappante, non ? Pour évaluer la facilité de compréhension de vos textes, des linguistes ont même conçu des indices de lisibilité, consultables dans certaines versions de Word. Tous reposent sur la longueur des phrases et des mots.
C’est au moment de la relecture, et non de la rédaction du brouillon, que ces corrections doivent être faites. Rien de compliqué, encore une fois ! Plus vous vous corrigerez, plus la simplicité deviendra un réflexe. Et si vous avez envie d’une expression plus créative et personnelle, explorez d’autres territoires d’écriture !